Compromis de vente : faut-il une lettre d’accompagnement pour que le délai de rétractation puisse courir ?

LE DÉLAI DE RÉTRACTATION OFFERT PAR LE CODE DE LA CONSTRUCTION ET DE L’HABITATION

Le délai de rétractation de dix jours offert à l’acheteur après la signature d’un compromis de vente est prévu par l’article L.271-1 du Code de la construction et de l’habitation qui dispose que :

“Pour tout acte ayant pour objet la construction ou l’acquisition d’un immeuble à usage d’habitation, la souscription de parts donnant vocation à l’attribution en jouissance ou en propriété d’immeubles d’habitation ou la vente d’immeubles à construire ou de location-accession à la propriété immobilière, l’acquéreur non professionnel peut se rétracter dans un délai de dix jours à compter du lendemain de la première présentation de la lettre lui notifiant l’acte”.

Dans une affaire jugée le 9 juillet 2020 par la 3ème chambre civile de la Cour de cassation, la Haute Cour s’est penchée sur une problématique liée au point de départ du délai de rétractation en cas d’absence de lettre d’accompagnement jointe lors de la notification du compromis de vente. (Cour de cassation, Chambre civile 3, 9 juillet 2020, n°19-18.943)

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LA PROBLÉMATIQUE CONFIEE A LA COUR DE CASSATION

Par acte sous seing privé, Madame et Monsieur J. ont conclu avec Monsieur A. une promesse synallagmatique de vente de leur logement moyennant le prix de 300 000 euros sous condition suspensive de l’obtention d’un prêt immobilier.

Ce compromis de vente a ensuite été notifié à Monsieur A. par lettre recommandée avec accusé de réception afin que ce dernier puisse faire valoir son droit de rétractation pendant un délai de 10 jours comme le prévoit l’article L.271-1 du Code de la construction et de l’habitation.

Monsieur A. n’a pas usé de son droit de rétractation mais a néanmoins refusé de réitérer par acte authentique.

Selon lui, le compromis de vente lui ayant été notifié sans la lettre d’accompagnement qui serait prévue par l’article L.271-1 du Code de la construction et de l’habitation précité, le délai de rétractation de 10 jours qui lui était offert n’aurait pas commencé à courir.

Selon M.A, si le texte n’impose pas que la lettre de notification reprenne expressément le délai de rétractation de l’acquéreur, dès lors que l’acte lui-même en porte mention, encore faut-il que cette lettre existe.

De ce fait, l’acheteur estime que la seule présence, dans l’acte au paragraphe «droit de rétractation», des modalités de l’exercice de ce droit ne permet donc pas, en l’espèce, de purger l’irrégularité de la notification commise.

Monsieur A. a alors été assigné par les vendeurs afin que celui-ci soit condamné en vente forcée ainsi qu’au paiement de diverses sommes.

Le 3 avril 2019, la Cour d’appel de Rouen faisait droit aux demandes de Monsieur A. en considérant que la notification de la promesse synallagmatique de vente était irrégulière et prononcait la caducité de celle-ci en raison de l’absence de lettre d’accompagnement.

L’ARGUMENT RETENU PAR LA COUR DE CASSATION : NUL BESOIN DE JOINDRE UNE LETTRE D’ACCOMPAGNEMENT AU COMPROMIS

La Cour de cassation a cassé l’arrêt de la Cour d’appel de Rouen en considérant que celle-ci avait “ajouté à l’exigence légale de notification de l’acte une condition qu’elle ne comporte pas” [et a ainsi] violé le texte susvisé”.

D’après la Haute Juridiction, le compromis lui-même suffit s’il précise les conditions d’exercice du droit de rétractation.

“ALORS QUE l’article L. 271-1 du code de la construction et de l’habitation n’exige pas qu’une lettre d’accompagnement soit jointe à l’acte sous seing privé de vente adressé à l’acquéreur par courrier recommandé avec avis de réception ; qu’il faut, et il suffit, que soit explicité, dans le compromis de vente notifié à l’acquéreur, le droit de rétractation qui est reconnu à tout acquéreur non-professionnel ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a elle-même constaté que la promesse de vente litigieuse, qui avait été notifiée à M. A… par courrier recommandé réceptionné le 9 octobre 2015, précisait les modalités d’exercice du droit de rétractation de l’acquéreur ; qu’en décidant néanmoins que les conditions d’information posées par l’article L. 271-1 du code de la construction et de l’habitation n’avaient pas été respectées aux motifs que « M. A… n’a reçu le 9 octobre 2015 qu’une copie de cet acte (de vente) par courrier recommandé, sans aucune lettre d’accompagnement » (arrêt, p. 6 § 7), la cour d’appel a ajouté à la loi une condition qu’elle ne comporte pas et a violé l’article L. 271-1 du code de la construction et de l’habitation, dans sa rédaction applicable en la cause.”

CE QU’IL FAUT RETENIR

Pour faire courir le délai de rétractation de 10 jours ouvert à l’acheteur d’un bien immobilier, l’acte doit être notifié par courrier recommandé avec accusé de réception. L’absence d’une lettre d’accompagnement ne remet pas en cause la validité de cette notification.

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