Vous trouverez ci dessous l’analyse de Me Ribeiro de Carvalho, Avocat en Droit immobilier à Nice portant sur la responsabilité de l’agent immobilier.
I Portée de l’arrêt : la responsabilité de l’agent immobilier
L’agent immobilier engage sa responsabilité contractuelle s’il ne prouve pas avoir conseillé ses mandants de l’intérêt de prendre des garanties suffisantes ou encore de les avoir informés et alertés contre les risques d’insolvabilité du candidat acquéreur qu’il leur a présenté.
C’est ce qui ressort de l’arrêt récent rendu par la Cour de cassation le 11 décembre 2019 (Civ. 1ère. 11 déc. 2019, F-P+B+I, n°18-24.381).
Cette décision est donc sévère envers les agents immobiliers qui peuvent voir leur responsabilité contractuelle engagée s’ils ont méconnu leur devoir de conseil quant aux risques d’insolvabilité d’un potentiel acquéreur.
Ce devoir de conseil va donc de plus en plus loin désormais, la Cour de cassation estime que l’agent immobilier doit informer ses mandants de l’importance de prendre des garanties avant de signer un compromis notamment, mais ce n’est pas tout, ce dernier devra aussi estimer les risques d’insolvabilité des potentiels acquéreurs qu’il présente et en informer ses mandants le cas échéant.
II Les faits
En l’espèce, vendeurs et candidat acquéreur avaient signé un compromis de vente dans lequel le potentiel acquéreur disait ne pas devoir recourir à un emprunt.
Or le candidat acquéreur âgé de 25 ans, était célibataire et exerçait la profession de cariste magasinier.
L’intéressé ne s’étant pas présenté lors de la signature de l’acte authentique, la vente ne fut pas menée à son terme.
Ce dernier refusant de conclure la vente et de payer le montant de la clause pénale prévue, les vendeurs décidaient d’engager sa responsabilité, mais également celle de leur agent immobilier pour ne pas avoir rempli son devoir de conseil.
Dans un premier temps, la Cour d’Appel d’Amiens avait jugé que les vendeurs étaient informés de ce que le futur acquéreur ne recourait pas à un prêt pour faire l’acquisition du bien, cet élément étant indiqué dans le compromis, et que ces derniers étaient libres de refuser de conclure la vente s’ils estimaient que les garanties n’étaient pas suffisantes.
III La décision de la Cour de cassation
La Cour de cassation a estimé au contraire que l’agent immobilier avait méconnu l’article 1147 du Code civil relatif à la responsabilité contractuelle et à son devoir de conseil :
“Qu’en statuant ainsi, alors que l’agent immobilier n’avait pas justifié avoir conseillé aux vendeurs de prendre des garanties ou les avoir mis en garde contre le risque d’insolvabilité de l’acquéreur qu’il leur avait présenté, la cour d’appel a violé le texte susvisé;”.
Cette décision, est sévère mais présente une certaine logique.
Des vendeurs mal informés perdront du temps et de l’argent en signant un compromis de vente avec un acquéreur potentiel insolvable. Le bien sera en effet immobilisé inutilement.
Les vendeurs auront perdu la chance de conclure avec un acquéreur solvable.