I Rappel des faits et de la procédure
Lorsque l’immeuble vendu est atteint de vices cachés nécessitant sa démolition, l’acquéreur qui a choisi de le conserver sans restitution de tout ou partie du prix de vente est fondé à obtenir du vendeur de mauvaise foi des dommages et intérêts équivalant au coût de sa démolition et de sa reconstruction (Civ. 3ème. 30 jan. 2020, FS-P+B+I, n°19-10.176).
En l’espèce, les acquéreurs d’une maison découvrant que le bien objet de la vente présentaient de nombreux désordres, ont décidé d’assigner le vendeur ainsi que le notaire en garantie des vices cachés, et ont appelé en garantie l’agent immobilier.
La Cour d’appel a suivi le raisonnement des acquéreurs et a condamné le vendeur à restituer aux acquéreurs une partie du prix de vente et à leur payer le coût des travaux de destruction et de reconstruction de la maison.
Le notaire et l’agent immobilier ont été condamnés à supporter cette condamnation à hauteur de 10 %.
Cette décision a été cassée par la 3ème chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt du 14 décembre 2017 (Civ. 3e. 14 déc. 2017, n°16-24.170).
L’affaire a ainsi été renvoyée devant la Cour d’Appel de Lyon.
II La solution
Cette fois, la Cour d’appel de renvoi a condamné le vendeur au paiement du coût des travaux de destruction et de reconstruction, et le notaire et l’agent immobilier à en supporter 10 % à leur charge, sans prévoir de restitution d’une partie du prix de vente.
En principe, sur le fondement de la garantie des vices cachés (article 1644 du Code civil), deux choix se présentent pour l’acquéreur :
- L’annulation de la vente et ainsi, la restitution du prix de vente : on l’appelle l’action rédhibitoire.
OU
- La conservation le bien et l’obtention d’une diminution du prix : appelée l’action estimatoire.
En l’espèce, les acquéreurs avaient décider de conserver leur bien.
Dans son arrêt du 30 janvier 2020, la Cour de cassation a ainsi jugé que :
“Ainsi, lorsque l’immeuble vendu est atteint de vices cachés nécessitant sa démolition, l’acquéreur qui a choisi de le conserver sans restitution de tout ou partie du prix de vente est fondé à obtenir du vendeur de mauvaise foi des dommages et intérêts équivalant au coût de sa démolition et de sa reconstruction”.
Pour autant, la restitution d’une partie du prix de vente n’exclut pas la réparation des préjudices subis par l’acquéreur en raison du vice de la chose. C’est d’ailleurs ce qu’avait rappelé la Cour de cassation le 14 décembre 2017 :
“La réduction du prix à laquelle le vendeur se trouve tenu en vertu de l’article 1644 du code civil ne constitue pas, en elle-même, un préjudice indemnisable (…)”.
Ainsi, l’action en indemnisation peut être exercée indépendamment de l’action rédhibitoire ou estimatoire. (Com., 19 juin 2012, pourvoi n° 11-13.176, Bull. 2012, IV, n° 132 ; 1re Civ., 26 septembre 2012, pourvoi n° 11-22.399, Bull. 2012, I, n° 192 ; 3e Civ., 24 juin 2015, pourvoi n° 14-15.205, Bull. 2015, III, n° 66).
III Conclusion
En conclusion, la Cour de cassation, dans cet arrêt du 30 janvier 2020 a jugé que, bien que le prix n’ait donné lieu à aucune restitution, les différents responsables pouvaient être tenus de l’entière réparation du préjudice (remboursement du coût des travaux de démolition et de reconstruction), dans la mesure où le préjudice subi du fait du vice ne pouvait être réparé intégralement que par la démolition et la reconstruction de la maison, objet de la vente.
Ainsi, l’acquéreur pourrait se contenter d’exercer une action en dommages et intérêts, sans intenter une action rédhibitoire ou estimatoire sur le fondement de la garantie des vices cachés, s’il estime que le coût des réparations peut être supérieur à la restitution du prix qu’il peut obtenir devant les juridictions (voir feuille Dalloz).
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